Pour la saison 2015/2016, l’association Médecins de montagne précise dans une intéressante infographie que sur 8 millions de pratiquants de sport de glisse, il y a eu 150 000 personnes blessées. Les débutants sont deux fois plus exposés et les blessures les plus courantes concernent le genou (dans 29% des cas) et touchent plus largement les femmes.
Pour bien se préparer et réduire le risque d’accidents, François Specklin, masseur-kinésithérapeute au KOSS Paris et de l'équipe de France de ski alpin handisport a prodigué ses conseils à la rédaction de 66 Millions d’IMpatients.
66 Millions d’IMpatients : Le genou est particulièrement exposé aux risques de blessures. Comment l’éviter ?
Effectivement, parmi les blessures courantes à ski, il y a celles qui touchent les genoux. Les enfants plus souples s’en sortent mieux. Cependant dès l’adolescence, surtout si l’on a tendance à prendre des risques, à sortir des pistes balisées, à aller dans la poudreuse, alors on s’expose facilement aux entorses du genou et notamment à la rupture du ligament croisé antérieur.
Le port d’une genouillère peut être intéressante pour les personnes anxieuses qui ont déjà eu des blessures au genou car elle permet de leur rappeler d’être prudent mais elle n’évite pas vraiment la blessure au niveau du genou.
Comment protéger les autres parties du corps les plus exposées aux blessures à ski ?
Le casque : c’est la première protection à laquelle il faut penser pour réduire le risque de contusions et commotions cérébrales, et c’est valable autant pour les enfants que pour les adultes. Bien qu’il ne soit pas obligatoire, en général les écoles de ski exigent le port du casque pour les enfants.
La dorsale : de plus en plus de skieurs s’équipent également d’une protection dorsale, qui est comme le casque, tout aussi importante chez les adultes que chez les enfants. Il s’agit d’une ceinture avec une « coque » qui protège le dos comme son nom l’indique. La dorsale réduit le risque de fracture vertébrale qui peut survenir lorsque l’on chute sur le dos. Certaines dorsales descendent même jusqu’au niveau du coccyx. Je conseille d’ailleurs les dorsales intégrales qui courent depuis les cervicales basses, c’est-à-dire le haut du dos, jusqu’aux fesses. La dorsale peut en outre permettre de maintenir une meilleure posture en ski et de se tenir plus droit.
Les protections des poignets et des épaules : les snowboarders sont les plus exposés à la fracture du poignet et aux lésions de l’épaule mais elles ne sont pas rares non plus en ski alpin. Il existe des protections adaptées dans les deux cas.
Peut-on pratiquer le ski à tout âge et quelles sont les contre-indications ?
On peut pratiquer le ski à tout âge mais il faut être précautionneux et ne pas hésiter à se faire accompagner d’un moniteur, surtout si l’on débute.
Côté contre-indications, il y a :
Les problèmes d’os fragilisés par une ostéoporose. Dans la mesure où le ski alpin et le snowboard sont des sports traumatiques, leur pratique est contre-indiquée en cas d’ostéoporose car le risque de fracture en cas de chute ou de choc augmente. On préférera alors le ski de fond, peu traumatique.
Le fait d’avoir une blessure fraîche, que cela soit musculaire, tendineux, ou ligamentaire. Dans de tels cas, il ne faut tout simplement pas aller skier et attendre que la blessure guérisse.
La hernie discale en cours de traitement.
Les problèmes cardiaques non-contrôlés.
Un état fiévreux.
La fatigue : Le risque d’accident augmente avec la fatigue. Cela peut sembler évident et pourtant il arrive trop souvent que l’on aille skier alors que l’on manque de sommeil car on veut aussi profiter des vacances pour sortir le soir. Dès que l’on ressent de la fatigue, il ne faut pas hésiter à faire une pause, quitte peut-être à ne pas skier durant toute une journée.
Est-ce prudent de faire du ski si l’on n’est pas du tout sportif le reste de l’année ?
Faire du ski sans faire aucun sport le reste de l’année augmente évidemment le risque de se blesser sur les pistes. C’est d’ailleurs pour cela qu’il y a autant de blessures sur les pistes car on a besoin d’être un minimum préparé musculairement pour pratiquer le ski.
Si l’on a prévu de pratiquer un sport de glisse à la montagne, il est vraiment bénéfique de s’y préparer au moins 3 ou 4 mois à l’avance si l’on n’est pas particulièrement sportif. Pour cela, on peut faire régulièrement un peu de gainage, des squats, travailler l’équilibre en restant sur une jambe, sur la pointe des pieds ou en faisant de la corde à sauter. Il est également nécessaire de faire un peu de cardio-training car le ski et le snowboard peuvent être assez exigeants sur le plan cardiaque selon la façon dont on le pratique.
Si besoin, on peut demander conseil à un coach ou un kinésithérapeute pour apprendre les meilleurs exercices à pratiquer.
Si malgré tout on arrive sur les pistes sans préparation, il ne faut pas pousser trop loin la pratique. Il est alors important de s’en tenir à des pistes faciles et de les descendre à un rythme raisonnable. Il est important d’aller progressivement durant le séjour. Il n’est évidemment pas question de commencer directement par un mur de bosses sur une piste noire ! Ce n’est pas du tout l’occasion de chercher à faire des performances. Au cabinet, on voit souvent passer des patients qui se blessent dès le premier jour de ski parce qu’ils ont surestimé leurs capacités.
Donc, si l’on n’est pas sportif et que l’on sait skier, on s’en tient à du ski pour le plaisir, sans forcer, et si l’on ne sait pas skier, je recommande grandement de prendre des cours.
Est-il nécessaire de s’échauffer le matin avant de chausser ses skis ?
Avant de descendre la première piste, c’est important de faire un petit réveil musculaire, quel que soit son âge.
Faire monter le rythme cardiaque : pour cela, on peut par exemple monter et descendre quelques escaliers dans son immeuble ou dans la station.
On peut également faire des flexions des genoux alternés avec des pointes de pied.
Enfin, on travaille le dos dans toutes les directions, avec des rotations, des flexions, des extensions, des inclinaisons pour mobiliser au maximum toutes les parties du dos.
Dans tous les cas, si l’on est un skieur occasionnel, chaque matin on commence par une piste facile pour s’échauffer.
Comment réduire le risque de courbatures ?
Pour éviter les courbatures il y a plusieurs méthodes :
La récupération active qui favorise la récupération musculaire : cela consiste à faire une trentaine de minutes d’exercices cardio à un rythme léger et assez rapidement après l’arrêt du ski, c’est-à-dire dans les 30 minutes à 1 heure qui suivent la fin de la journée de ski. Il peut s’agir par exemple de s’entraîner en salle en faisant du vélo ou du rameur, ou bien d’aller à la piscine pour une séance d’aquagym.
Les étirements : ils sont à pratiquer une fois que le muscle est froid car sinon on risque de forcer et de trop l’étirer. Ce genre d’exercices est donc à pratiquer au-delà d’une heure après l’arrêt du ski. Il s’agit d’étirer les groupes musculaires, surtout au niveau des jambes (principalement les mollets et les cuisses) ainsi que le dos. Pour cela, on peut tout à fait faire des postures de yoga pour ceux qui le pratiquent, jumelées avec des exercices de respiration.
Les méthodes passives : – Le massage après l’effort est idéal si on peut se rendre chez un kinésithérapeute. Si l’on n’a pas l’occasion de pouvoir prendre rendez-vous chez un thérapeute, on peut aussi demander à un(e) ami(e) de faire le massage. Le principe est alors de se concentrer sur les jambes et le dos avec des mouvements qui vont vers le cœur. On commence par le dos, puis le haut des jambes pour descendre vers les chevilles. – Les thermothérapies comme le sauna, le hammam ou le jacuzzi favorisent le retour veineux et le relâchement musculaire. Un bon bain chaud d’une vingtaine de minutes fait aussi parfaitement l’affaire ! – Les vêtements compressifs comme les bas de contention sont également de plus en plus utilisés par les sportifs après l’effort. Associés au fait de surélever les jambes, cela va favoriser le retour veineux.
Une dernière recommandation ?
Soyez attentifs aux consignes délivrées par le personnel de station, concernant les pistes. Ils savent ce qu’ils font lorsqu’ils ferment une piste notamment : c’est bel et bien qu’il s’agit d’une zone à risques.
Enfin, bien entendu, il est très important de respecter les autres skieurs, de ne pas leur couper la route, de ne pas aller trop vite quand il y a du monde, bref de prendre soin les uns des autres !
Retrouvez l'article original : ici
Interview de François SPECKLIN (KOSS Paris - équipe de France de ski alpin handisport)
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